Heure d'été (extrait)

Publié le par David Branger

 

Autre morceau symphonique majeur, Heure d’été colle parfaitement au déroulement de l’action. Si j’ai fait quelques allusions à des mouvements ou à un genre musical, il se retrouve dans ce morceau où David joue habilement avec la pression qu’il fait monter jusqu’à la fin.

La première fois que je l’ai écouté, j’ai tout de suite remarqué la lecture qu’il avait eue de la fin de la nouvelle. Je ne me souvenais pas avoir pensé une fin aussi douce, aussi optimiste. A la relecture de mon texte, je me suis rendu compte que j’avais effectivement laissé plus de liberté au lecteur pour se faire sa propre fin.

 

 

 

* * * * * * * * * *

 

 

 

Extrait de la nouvelle :

 

 

Première journée.

 

Morgane ouvrit un œil.

A travers les persiennes, elle voyait que le jour était bien avancé. Elle se redressa sur son lit et regarda le réveil qui indiquait à peine sept heures du matin.

On était dimanche et elle se réveillait comme en semaine, comme si elle devait attaquer une dure journée de labeur ! Pourtant, elle avait l’opportunité de dormir, de flâner au lit mais rien n’y faisait, son corps lui disait qu’elle devait se lever.

Ce qu’elle fit.

Elle prit sa douche, tranquillement, se disant qu’elle avait tout le temps du monde.

Elle enchaîna avec un petit déjeuner tout ce qu’il y avait de plus simple et décida d’allumer son ordinateur pour aller voir ses e-mails. Elle détestait rester devant pendant qu’il se lançait. Alors elle prévoyait toujours de faire quelque chose entre temps : faire sa vaisselle, se laver les dents, mettre ses couverts dans l’évier quand elle n’avait pas l’intention de les laver ; n’importe quelle broutille, pourvu qu’elle ne reste pas à attendre devant l’écran. Il s’allumait pourtant rapidement, il ne fallait pas patienter plus de quelques secondes, une minute à tout casser mais elle trouvait ce peu de temps là très, très long.

Comme elle trouva que mettre ses couverts dans l’évier n’avait pas pris assez de temps, elle se fit chauffer un thé vert, pour ses vertus anti-stress. Elle aimait se poser devant son ordinateur et sentir les volutes rafraîchissantes de menthe qui se dégageaient de sa tasse. Quand elle eut terminé sa préparation, elle savait qu’elle n’aurait plus à patienter.

Elle s’installa sur son fauteuil de bureau et au moment où elle prit la souris en main, ses yeux se posèrent sur l’horloge de l’ordinateur. Il indiquait : « 9 : 23 ». Sur le coup elle fut assaillie par une vague de sueur froide. Il n’était pas plus de huit heures trente pour elle et pas neuf heures vingt-trois !

Soudain, elle eut le déclic. On était le dernier week-end du mois de mars et c’était toujours à cette période que l’on passait à l’heure d’été.

Elle avait planifié sa journée de repos, elle savait qu’elle voulait aller faire un petit jogging, dans la matinée, avant qu’il ne fasse chaud ; elle voulait se préparer un petit repas à midi, fait de salade et de toute sorte de crudités ; et pourquoi pas se regarder un film dans l’après midi, tranquille, sans rien demander à personne.

Et voilà, qu’elle avait déjà perdu une heure de sa vie. Il lui fallut quelques instants pour accepter le fait qu’elle avait oublié d’avancer toutes ses montres d’une heure.

Elle ne savait pas comment l’expliquer mais cet oubli lui pourrissait la vie. C’était presque comme le deuil d’un événement tant attendu et qui au final n’aboutit pas. Une grande et profonde déception. Elle avait perdu une heure alors que son esprit, lui, n’y avait pas été préparé. Elle n’aimait déjà pas changer d’heure en étant prête. Surtout le passage à l’heure d’été. Si l’esprit pouvait rapidement s’habituer à ce changement ; le corps, lui, réclamait son dû et il lui fallait plus de temps pour s’en remettre.

Aujourd’hui, il en faudrait encore plus à Morgane pour se relever de la claque qu’elle venait de recevoir. Depuis le temps qu’elle attendait ce week-end pour enfin ne penser à rien, juste attendre que le temps s’écoule tranquillement, sans penser au boulot, sans stress, sans avoir à péter les plombs dans les embouteillages…

Elle se détesta presque d’avoir oublié.

Elle décida que ce jour devait quand même être bon, qu’elle n’allait pas se laisser abattre pour si peu. Elle fit ce qu’elle avait à faire de plus pressant, c’est à dire un peu de ménage, poussière, etc… Tout ce qu’elle ne pouvait faire durant la semaine. A la fin, elle découvrit que ce passage à l’heure d’été était une vraie plaie. Malgré ses efforts, sa journée était fichue.

 

 

Seconde Journée.

 

Morgane patientait au volant de sa voiture, dans les embouteillages déjà fréquents de la matinée.

Des travaux de partout ! Des marteaux piqueurs qui crevaient l’asphalte, les rues qui ressemblaient plus à des champs de mines ou à Verdun…

Morgane déprimait rien qu’en regardant cette façon de détériorer le paysage pour soit disant embellir la ville. En attendant, les doubles voies étaient réduites à une seule et il fallait compter sur le bon sens et la gentillesse de son prochain pour pouvoir avancer. Autant dire à quel point Morgane était au point mort !

Elle écoutait sa radio d’un air distrait. Elle ne faisait qu’un bruit de fond, quasiment couverte par les bruits dérangeants alentours.

Quand elle put repartir et rouler à vitesse constante, elle comprit que, parfois, être stoppé trois heures dans un embouteillage était préférable plutôt que de se payer des branquignols qui ne savent pas avancer avec leur voiture !

Ceux qui ne savent pas où ils vont et qui changent de file sans arrêt ; ceux qui restent trois plombes à un feu vert ; ceux qui déboîtent sans regarder qui arrive derrière…

Morgane en avait marre.

Pour entrer sur son lieu de travail, elle devait passer un badge dans une fente. Ainsi, on savait qu’elle arrivait et en fin de journée, on savait qu’elle repartait. Seulement ce matin là, la petite lumière rouge, qui indiquait que la porte était fermée, resta rouge, même après plusieurs passages.

 

 

Extrait musical associé :

 

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